NOS DIFFERENCES : "Sourde"







Audrey Lessard, première femme médecin sourde au Québec

Née en 1982, elle a toujours voulu être médecin. On lui disait que c'était impossible parce qu'elle était sourde.

«Ma mère et mon père m’ont beaucoup encouragée à lire sur les lèvres et à apprendre à articuler, raconte-t-elle. Ils voulaient que j’apprenne le français avant la langue des signes, pour que je puisse m’intégrer plus facilement dans la société.»

Audrey va à l’école assistée d'une interprète... «J’étais toujours la dernière de la classe, mais la première en mathématiques! Le plus gros défi, c’était surtout l’attitude des enfants par rapport à mon handicap. Certains pouvaient être vraiment méchants.»

Quatre interprètes différents se succèdent pendant son parcours secondaire et huit, pendant ses études universitaires. «Ça demande des personnes très motivées et qui aiment apprendre, souligne la jeune femme. Les termes médicaux, il n’y a pas de signes pour ça!» Audrey apprend les bases du langage médical à ses interprètes afin qu’ils puissent suivre les cours avec elle.

Audrey s'inscrit en pharmacologie puis en podiatrie, (la santé des pieds) : «Un domaine où on peut encore être pionnier». À la clinique, la jeune médecin rencontre ses patients en compagnie d'une interprète, Patricia Béland.

Actuellement, Audrey rédige un livre pour «montrer aux parents comment ils peuvent aider leur enfant atteint de surdité. Malgré tous les obstacles, je n’ai jamais abandonné, j’ai toujours eu le même rêve. J’ai suivi la trajectoire de l’objectif que je m’étais fixé à l’âge de trois ans : devenir docteur.»


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Helen Jarmer, première députée sourde à l'Assemblée autrichienne

Elue écologiste du parti des Verts, elle a prêté serment le 10 juillet 2009 devant le parlement autrichien à Vienne.

Agée de 38 ans, l'élue sourde sera assistée en permanence d'une interprète en langue des sourds. Désormais, tous les débats lors des séances du parlement autrichien seront traduits en langue des sourds.
Née de parents sourds, Helene Jarmer a perdu l'ouïe à l'âge de deux ans lors d'un accident de voiture. Professeur de mathématiques et de dessin, elle a suivi des études spécialisées pour sourds en Autriche puis aux Etats-Unis où elle a été diplômée de l'Université de Washington DC en langue des signes américaine.
Elle milite activement pour l'intégration des sourds dans la société autrichienne, en particulier dans le système scolaire. La jeune femme a notamment créé un site internet d'information spécialisée.
Helene Jarmer est la troisième élue sourde en Europe à siéger dans une assemblée, après l'élection du conservateur hongrois Adam Kosa au parlement européen et celle de l'indépendantiste belge flamande Helga Stevens qui siège au parlement flamand.

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Emmanuelle Laborit : « La surdité n’est pas un handicap à réparer »

Lire l'article d' Alexandra Bogaert

OUI à la NON-mixité /DOSSIER

Pourquoi des fêtes non-mixtes femmes, lesbiennes, trans ?

Source : Anonyme ?

Faire des groupes de femmes, pour parler du vécu des inégalités entre femmes et hommes, pour analyser l’oppression que l’on subit, là on voit bien. Mais pourquoi faire des fêtes entre femmes de tous poils ?

Parce que j’aime mieux ces ambiances. Pourquoi je préfère les fêtes non-mixtes ? Parce que dans ce cadre, les comportements qui me gâchent les fêtes ne sont pas là. C’est con, mais sans mecs, il n’y a pas plein de moments relous à gérer.

Parce que dans les fêtes mixtes, il y a toujours un mec pour me parler comme à une moule géante, comme si je ne suis pas un être humain, mais une chatte sur patte. Et qui m’insulte, me menace, ou est agressif avec moi quand je lui signifie que je veux bien parler avec lui, mais pas sur un thème sexuel. Et qui ne supporte pas que je sois désagréable quand il continue.

Parce que dans les fêtes mixtes, il y a toujours un mec pour venir bouffer notre espace quand je discute avec mes copines. Des femmes qui parlent ? Pas de soucis, on peut leur couper la parole, ah oui c’est l’homme qui arrive. Mais ça peut être plus subtil : parler fort à côté de nous, chanter, taper sur la table avec ses doigts, faire branler la chaise qui fait branler la pièce. Bref, toujours un mec pour ne pas supporter que quand il passe à côté de nous on ne le regarde pas, on ne s’occupe pas de lui.

Parce que dans les fêtes mixtes, il y a toujours des gens pour me regarder embrasser une autre meuf, comme si on était des animaux de foire, ou qui nous reluquent de façon intéressée, lubrique, comme si on était en train de faire un spectacle porno, ou, au pire, mais si courant, qui demandent de participer (parce que les lesbiennes ensemble, comment elles font pour baiser ???).

Parce que dans les fêtes mixtes, exister en tant que ce que je suis, lesbienne et féministe, il y a souvent des femmes et des hommes qui me disent gentiment que je le fais pas de la bonne manière : en tant que lesbienne, je suis trop visible, trop stéréotypée, trop masculine, trop féminine, je mets mal à l’aise les hétéros (...) et en tant que féministe, je suis pas sympa, trop agressive, sans humour, pas assez diplomate, trop diplomate, trop victime, trop violente... Bref, dans les fêtes mixtes, il y a toujours des gens ’dans la norme’ qui me disent très sincèrement comment il faut se comporter quand on n’est pas dans la norme, pour que les gens normaux ils soient content-e-s aussi, et surtout pour bien faire passer ton message ; parce qu’illes le savent bien mieux que toi, même si illes y ont réfléchi depuis deux heures, qu’illes te posent pas de question (parce que toi, tu ne te poses pas cette question à chaque fête mixte où tu étais venue pour t’amuser) et qu’illes ont jamais réfléchi à ce que je vis.

Parce dans les fêtes mixtes aussi, il y a toujours un mec bourré relou à la fin, dont il faut s’occuper, le pauvre chéri. Et qui menace de frapper quelqu’un-e ou de saloper ton lieu si tu t’occupes pas de lui.

Parce que dans les fêtes mixtes, on va pas demander une carte du gentil mec sympa, et que souvent celui qui va pas boire et gueuler, il va te draguer, celui qui est pas violent physiquement il va te faire la leçon de morale, celui qui est discret, il va quand même violer sa meuf... Bref parce que dans les fêtes mixtes, on va pas filtrer, et je vois pas sur quels critères on pourrait le faire vu que même mes potes mecs se retirent pas totalement de la tête que j’appartiens à une autre race qui a de fait moins de droit, de légitimité, ou alors, que je suis quand même, au fond, faite pour être baisée.

Parce que dans les fêtes mixtes, j’ai souvent des copines, des potes pédés ou racisés qui se font taper sur la gueule, et que ça me gâche ma fête (et qu’à force, je surveille quand j’arrive dans un endroit, lequel va nous agresser).

Parce que dans les fêtes mixtes, il y a souvent, vous l’avez compris, des mecs qui sont agressifs si tu leur réponds pas gentiment quand ils te parlent comme à un trou, si tu les regardes pas, si tu trouves la discussion avec ta pote plus intéressante, si tu montres que tu es lesbienne, si tu restes jusqu’à la fin, si tu baisses pas les yeux quand ils t’agressent, etc.

J’aime les fêtes non-mixtes, parce que enfin, je peux M’AMUSER TRANQUILLE, baisser ma garde, savoir que j’aurai pas à gérer tout ça, qu’on va me parler comme à un être humain, pas ’comme à une femme’, ’comme à une homo’, ou ’comme à une nana qu’il faut remettre à sa place parce qu’elle ne se soumet pas’. Je peux danser comme je le veux, sans qu’un gars croit que ça veut dire ’saute moi dessus’, je peux m’habiller comme je veux, me déssaper, sans que les nanas qui sont là, bien que certaines soient lesbiennes, croient que ça veut dire qu’elles peuvent se passer de mon consentement explicite pour me toucher, m’embrasser, coucher avec moi.

J’aime les fêtes non-mixtes parce que j’aime partager des moments de joie avec mes soeurs de condition, sans qu’il y ait un connard, camarade ou pas, pour nous pomper l’air. Et parce que des fois, si j’aime bien faire la fête en gérant l’embrouille, l’agressivité, ou en étant d’humeur guerrière, des fois, j’aime que non, j’aime bien faire la fête dans un monde moins con.

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Pour la non-mixité

Source : Octav.i.e

LA MIXITE ETANT POSEE COMME UNE VALEUR d’ouverture (à la Différence), la non-mixité devient alors un rétrécissement (rabougrissement) vers l’entre-soi vécu comme un appauvrissement.
MAIS, de fait, il y a des endroits où on ne peut pas aller parce qu’on est ce qu’on est, là ou il faudrait être ce qu’on n’est pas pour pouvoir entrer : parce qu’on n’est pas membre / pas homme / pas riche / pas blonde avec des gros seins / pas PDG / pas chef de gang / pas infirmière / pas astronaute...

LA MIXITE, d’abord entendue comme celle des genres, suppose un mélange de NATURES différentes comme si femmes et hommes étaient naturellement différent.e.s. Or, l’espèce humaine (‘sapiens’, dit Michèle Causse) est un produit grandement culturel. Et c’est par le recours au genre que femmes et hommes sont culturellement, socialement différencié.e.s - l’un étant universalisé, l’une étant genrée : ‘féminisée’ – sur la base d’une seule et unique différence, le ‘sexe’.

CERTES LA MIXITE SOCIALE est intéressante, porteuse d’échanges, de rencontres de l’Autre, de découvertes des différences et tout cela riche de dépassement de sa conscience étriquée d’individu.e vivant ici et comme ça en ignorant presque tout de l’ailleurs et du pas-comme-moi...
MAIS PENSER l’entre-femmes comme une fermeture c’est accorder du crédit à la biologisation et nier la diversité sociale.

MAIS PENSER l’entre-femmes comme une exclusion, c’est nier l’exclusion première dont les femmes sont victimes dans une société androcentrée, où l’homme (humain mâle) est considéré comme la référence et la femme (humain femelle) comme spécifique (cf. le travail de Claire Michard).
C’est nier la domination masculine et la nécessité pour les femmes de poursuivre la construction de leur défense.
C’est, de fait, imposer une dictature qui interdit la réunion (cf. les nombreux exemples historiques que nous ont fourni les régimes totalitaires) par crainte de la rébellion.
C’est nier la violence symbolique et la violence économique envers les femmes.
C’est ignorer la richesse du monde des ‘gynés’ dans lequel ‘chacune est à soi dans la relation philogynique avec l’autre’ (E. P. ) et la difficulté à penser par soi-même...

Et si la NON-MIXITE revendiquée politiquement par les femmes est si mal acceptée, il n’en va pas de même de celle, économique et beaucoup plus discrète (et de fait, elle ne remet pas en cause le pouvoir établi), qui regroupe les ‘riches’ entre eux dans des boites ‘privées’.

Sans compter tous les lieux qui, de fait, sont des espaces réservés aux hommes partout dans le monde, ici, ailleurs, où les femmes ne vont pas par crainte de la violence masculine : rues, bars, etc.

DANS UNE SOCIETE DOMINEE par la mâlitude, je revendique la nécessité d’espaces où l’on peut se retrouver dans l’entre-soi de manière militante, culturelle, festive pour prendre conscience de sa classe (ici de sexe / genre) et trouver la force et les moyens de lutter contre l'oppression et la discrimination.

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Mail à Ludi sur la non-mixité

Source : Bagdam Espace Lesbien

Je continue, si tu veux bien, notre conversation d’hier.
Je voudrais développer deux notions qui me paraissent essentielles : notre intérêt et notre plaisir.

I. Notre intérêt
À quoi sert la mixité pour le devenir lesbienne, pour notre déconstruction > construction ?
Quel + les hommes, les échanges avec eux, dans une pratique militante ou non, apportent-ils à la pensée lesbienne ? Autrement dit, à quoi nous servent-ils ? En quoi enrichissent-ils la pensée lesbienne ? Qu’inventent-ils pour les lesbiennes que les lesbiennes n’aient pas inventé ? RIEN.
En tant qu’élevées femmes (don de soi, oubli de soi, sacrifice de soi, servir tout le monde avant soi, ne pas dire non aux désirs des élevés hommes), notre premier réflexe de déconstruction doit être de travailler d’abord et avant tout pour nous, en toute légitimité et loin de toute culpabilité, de traquer en nous-même le conditionnement qui ne demande qu’à ressurgir (ne jamais sous-estimer la puissance en nous de la pensée dominante : elle nous a constitué depuis notre naissance). Nous devons être vigilantes en permanence à tout ce qui pourrait nous faire régresser, replonger dans le service et la secondarisation.
L’organisation des festivals LGBT est une flagrante illustration de cette régression : le plus souvent, ce sont des lesbiennes qui organisent et jamais elles n’imposent la parité, ce qui donne par exemple à Toulouse en 2008, sur 13 séances, 7 pour les gays, 2 pour les trans, 1 pour une problématique mixte, 3 pour les lesbiennes. Travailler avec les hommes revient à travailler pour les hommes.
Je pense profondément, comme je te l’ai dit hier, que fréquenter les hommes nous empêche de penser lesbien, nous fait perdre du temps dans notre devenir lesbienne, dans notre chemin pour arriver au plus près de nous-mêmes, de nos véritables désirs. Et mon hypothèse sur l’injonction actuelle à la mixité, doublée de l’apparition de la trilogie mariage/famille/enfant chez les lesbiennes durant cette décennie 2000 est précisément de l’ordre du « retour à l’étable ».
La mixité nous éloigne de nous-mêmes absolument.

Notre intérêt n’est pas celui des hommes
Dans leur immense majorité, les hommes n’ont aucun intérêt à la transformation radicale des rapports hommes/femmes. C’est un fait objectif : seules les dominées ont intérêt au changement, les dominants n’ont aucun intérêt à perdre leur statut de dominant. Ça tombe sous le sens. Tout va bien tant qu’il s’agit de proférer de belles paroles, mais quand les choses deviennent « sérieuses », c’est-à-dire quand il faut passer de la théorie à la pratique ou quand il y a des enjeux de pouvoir, les masques tombent.
Depuis l’apparition du MLF, on peut estimer à des centaines de milliers le nombre de femmes et de lesbiennes qui ont consacré et consacrent toujours leur vie à la transformation des rapports hommes/femmes. Combien d’hommes y ont consacré, y consacrent leur vie ? Je n’en connais que deux : l’un est Martin Dufresne, canadien, et il vit dans une grande solitude, me semble-t-il, l’autre était Léo Thiers-Vidal, mort en 2007 à 37 ans. Tu peux avoir une idée de ce qu’il écrit sur http://1libertaire.free.fr/leovidal.html : De l'indignation sélective des mecs anars... en général. C’était un grand ennemi de Welzer-Lang.
The signe qu’un homme est réellement du côté des femmes et des lesbiennes c’est précisément qu’il trouve normal, incontournable, la non-mixité. Ceux qui n’acceptent pas l’indépendance des lesbiennes et des femmes signent ipso facto leur certificat de machisme épais et négationniste : les mêmes ne contestent pas le droit de réunion et d’expression des Noirs, des Arméniens, des Juifs, des Arabes, des Latinos et tutti quanti, parce qu’il ne leur vient pas à l’idée de contester les dommages subis par ces groupes humains. Visiblement, pour eux, il n’y a pas de si grands dommages du côté des femmes. J’appelle ça du négationnisme.
En fait, pourquoi les hommes ne supportent-ils pas notre indépendance ? Pourquoi ces violentes réactions ? Explication : ça met en échec leur domination. Je n’en trouve pas d’autres. C’est pourquoi je ne leur fais aucune confiance. Les hommes sont mes ennemis politiques, qu’ils soient passifs (ceux qui profitent tranquillement de leur statut de dominants, sans en rajouter, mais sans jamais être déloyaux à leur classe de sexe) ou actifs (ceux qui agissent pour conserver leur pouvoir). Que je sache, aucun auteur gay n’a écrit : « Les gays ne sont pas des hommes. » « Homme est un concept irrécupérable. » Il n’y a pas d’équivalent de Wittig chez les penseurs gays.
Les hommes ne me servent à rien, sinon de repoussoir.

II. Notre plaisir
La non-mixité est d’abord pour moi, du PLAISIR ! Bagdam est Bagdam parce que le plaisir est le cœur palpitant de nos valeurs : d’abord et avant tout, se faire plaisir. Et la compagnie des élevés hommes ne me donne pas de plaisir. Pourquoi rechercher la compagnie de personnes qui ne me donnent PAS de plaisir ? C’est du simple bon sens. Tu vois, hier j’ai passé une délicieuse journée entourée de lesbiennes politiques (ben oui, quand même, être lesbienne ne suffit pas en soi et ne donne pas la science infuse, ni l’humour ni l’intelligence dont j’ai besoin pour vivre). J’ai pu être lesbienne non stop, à 100 %, j’ai pu parler lesbien non stop, à 100 %, aucun frein, aucune censure, et le plaisir de vos sourires, de vos rires, de vos pensées, de vos projets, de vos vies. N’en déplaise aux pourfendeuses d’essentialisme, je puise mes forces et mon plaisir chez les femelles de l’espèce, chez les élevées femmes qui pensent lesbien.
Et je pense à cet extrait d’une lettre de Marguerite Yourcenar à Natalie Barney : « Je me suis dit que vous aviez eu la chance de vivre à une époque où la notion de plaisir restait une notion civilisatrice (elle ne l’est plus aujourd’hui) ; je vous ai particulièrement su gré d’avoir échappé aux grippes intellectuelles de ce demi-siècle*, de n’avoir été ni psychanalysée, ni existentialiste, ni occupée d’accomplir des actes gratuits, mais d’être restée fidèle à l’évidence de votre esprit, de vos sens, voire de votre bon sens. »
Il faut savoir rester sourdes à nos propres
« grippes intellectuelles ».
Et tiens encore une autre citation, de Renée Vivien (vers 1900) :
« Je ne les aime ni ne les déteste. Je leur en veux d’avoir fait beaucoup de mal aux femmes. Ce sont des adversaires politiques que je me plais à injurier pour les besoins de la cause. Hors du champ de bataille des idées, ils me sont inconnus et indifférents. »
Et je termine par cette phrase de Michèle Causse, qui s’impose dans un développement sur mixité/non-mixité :
«Sortir de l’apartheid c’est engager une guerre de sécession.»
* Yourcenar écrit ça dans les années 50.

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Coordination lesbienne en France

Source : CLF

Extrait d'une intervention de Jocelyne Fildard où il est question de la réflexion qu'elle a développée sur le sujet où elle distingue « Non mixité d'exclusion » (celle que la société impose de fait aux femmes sans la nommer) et Non mixité de combat (celle que les femmes et les lesbiennes ont créé et dont il est question ci-dessous.

La CLF (Coordination lesbienne en France) est un collectif d'association non mixte. Elle met en avant la non-mixité, non pas dans un esprit de séparatisme ou de repli sur soi mais comme une stratégie de luttes. On nous le reproche, parfois, c'est oublier la non-mixité d'exclusion sur laquelle le patriarcat s'est appuyé, pendant longtemps pour dominer les femmes ,dans de nombreux domaines de la vie qu'ils soient culturels, politiques, religieux, professionnel etc. .

Notre non mixité nous permet de d'élaborer des analyses autonomes aboutissant sur parole elle aussi autonome et féministe ensuite portée à l'extérieur dans la mixité
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Pourquoi, des lesbiennes ont fait et font le choix de militer essentiellement avec les femmes, avec les féministes plutôt que de militer avec les gays : la réponse peut sembler banale mais tellement lourde de conséquences : les lesbiennes sont des femmes et les gays sont des hommes. Je m'explique : Les lesbiennes sont opprimées en tant que femmes et en raison de leur homosexualité, il y a cumul d'oppression. Les gays sont opprimés en tant qu' homosexuels mais pas en tant qu' hommes .
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Trop souvent, il nous a été conseillé de nous tourner vers les gays pour prendre en compte nos revendications...c'est un point de vue à ne pas négliger, mais symboliquement ,
- c'est ne nous identifier que par le prisme de notre sexualité,
- c'est ne pas nous reconnaitre comme des femmes à part entière,
- c'est aussi symboliquement nous renvoyer vers la domination masculine.

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Vous avez peur qu’on fasse exploser le bar si y’a pas de mec pour nous surveiller ?

Source : Malvira


J’ai proposé (avec beaucoup d’insistance, on est d’accord) que le Dyk’iri n’accueille plus que des femmes pendant cette soirée. La bonne nouvelle, c’est que les filles et les femmes à qui j’en ai parlé étaient très enthousiastes. La mauvaise, c’est que la MAC/RainbowHouse est beaucoup moins chaude…


Alors, fil rouge ou fil bleu ?

Pourquoi la non-mixité ? La non-mixité est une pratique politique (oui, j’ai écris un gros mot, je sais) qui permet à des groupes opprimés de s’émanciper sans le regard des groupes dominants (pour simplifier à mort). Le mouvement Noir, le mouvement ouvrier et le mouvement des femmes ont utilisé cet outil pour mettre au point des stratégies de lutte tout à fait nouvelles, en toute liberté.

En pratique, la non-mixité hors des groupes militants, ça sert à quoi ?


Eh bien dans ce cas précis, ça sert à empêcher la gêne occasionnée par les agressions des voyeurs, ou les agressions verbales des mecs qui se permettent des remarques graveleuses, voir des attouchements sur les lesbiennes. Parce que les femmes sont censées être à disposition des hommes, au moins visuellement (d’où les pubs avec des femmes dénudées, ou les remarques intrusives sur le physique des femmes que beaucoup de garçons trouvent tout naturel de déblatérer dès 14 ans-au choix « tu devrais maigrir/t’as pas seins/t’es moche/t’es bonne etc. ») hors, les lesbiennes dérogent à la règle. Elles ne veulent pas coucher avec des hommes ni se plier en quatre pour leur faire plaisir (ce qui est plus ou moins le but du dressage des filles à l’hétérosexualité, désolée les copines !). C’est probablement cet interdit sur le corps des lesbiennes qui motive cette forme de lesbophobie , ici l’hypersexualisation des lesbiennes via des films pornos par exemple, qui permettent aux machos d’avoir une sorte de contrôle sur ces femmes qui leur échappent.

Les résultats ? Voyeurisme, blagues malsaines, agressions verbales, physiques, sexuelles allant parfois jusqu’au viol (et tout ça est un peu pareil, à des échelons différents) ou au meurtres des femmes qui se défendent. Et nous n’avons pas à subir ça !


Il y a des solutions : autodéfense, éducation permanente (révolution lesbienne-féministe…), mais on a aussi besoin d’espaces de détente où se sentir bien, entre nanas, sans l’ambiguïté de la présence des mecs (hétéros/bi) dans les soirées lesbiennes, et le malaise qui en découle souvent, même quand les intrus se « contentent » de mater (le voyeurisme est une forme d’agression, et celles qui connaissent ce type de situation se souviennent du malaise qui sensuit). La non-mixité sert à créer des espaces où on n’a pas à se soucier de ce problème.


Ensuite, la non-mixité sert à se réapproprier un espace où comme partout, les hommes ont du pouvoir, et où les femmes sont moins nombreuses, et cantonnées le plus souvent en bas de la hiérarchie (pensez aux organisations LGBT que vous connaissez : non seulement se sont le plus souvent des mecs qui en sont les porte-paroles, mais aussi les présidents, les décideurs…). Enfin, et vous l’avez certainement remarqué, il n’y a pas de bars lez. Il n’y en a plus. Des bars lesbiens se sont ouverts à Bruxelles, mais ils ont tous fermé un à un, et voici quelques raisons :

C’était des bars « classiques », les femmes ne gagnant pas des masses de fric, soit on les a fermés, soit on a invité les hommes à y entrer pour faire survivre le lieu, auquel cas les voyeurs ramenaient leur sale fraise aussi sec, et les filles partaient. Les bars fermaient, fin de l’histoire, reprendre au début. Et ça fait des années que ça dure.


Vous voyez des deux côtés de la MAC ? Des bars gais. Des boîtes gaies (dont beaucoup interdites aux femmes). C’est bien sympa, mais où est notre espace ? On n’en a pas vraiment, faute d’argent, et de lieux disponibles (ou alors les squats, mais comme ailleurs les activités non-mixtes rencontrent parfois une très forte opposition). Et la MAC, qui n’est pas une organisation à but lucratif, peut nous offrir cet espace sans discrimination de classe, où l’on n’est pas obligées de consommer.


Pour les quelques –un-es qui trouvent scandaleux qu’on « exclue les hommes » (et qui n’ont jamais entendu parler de discrimination constructive) : les femmes savent qu’elles ne sont pas bienvenues dans beaucoup de bars (vous savez les vieux bars hétéros où il n’y a que des habitués qui vous regardent comme si vous débarquiez de Venus si vous venez y commander une bière), dans des groupes au boulot, au pouvoir également, le monde est dirigé par des clubs d’hommes. Normal de créer un espace en dehors de ces tensions ! Et partout dans Bruxelles les lesbiennes peuvent aller boire un coup ou s’amuser avec leurs copains. Mais uniquement avec leurs copines ? Où ?


La conclusion logique, c’est que faire des soirées pour filles uniquement serait très profitable, et même si la MAC est avant tout un point d’info, quand les filles qui n’ont jamais l’occasion d’y venir y découvrent des adresses, des activités ou des infos santé, c’est tout bénef pour tout le monde.

Et une soirée par mois, que les garçons aillent au bar d’à côté, ça n’a vraiment rien de dramatique. Qu’ils aient du mal à lâcher l’endroit, ça l’est davantage. Vu le nombre de soirées où il n’y a que de mecs à la MAC, une journée par mois pour que les filles se retrouvent entre elles, fassent la fête sans se sentir mal à l’aise ou se ruiner, franchement, c’est dérisoire…


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Mixité versus non-mixité


Source : Dirty Week-End


Vaste sujet et vaste débat. Je le sais, je le vis en ce moment au sein même du collectif. Prise de tête, prise de bec. Pourquoi je tends vers la non-mixité ? Déjà, ça ne concerne que les soirées, je ne suis pas séparatiste même si je ne côtoie absolument plus de garçons bios (je précise, ça a son importance, je crois) dans ma vie hormis les quelques crétins au boulot. Je milite enfin je m’active à créer avec des potes, une soirée faite par des filles, pour des filles. Or ça remue pas mal parce que ça ne cadre pas avec la norme. Déjà moi la norme, j’m’en tape, et bien au contraire si je peux shooter dedans, je le fais. Je voudrais juste pouvoir profiter de quelques moments, rien qu’à nous, pour nous, entre nous. Non pas de me séparer des hommes même si je le fais déjà naturellement et sans conscientiser mais juste afin d’échanger, de partager sur le fait d’être une femme, ce qu’on attend des autres, comment on le vit. Ok avec quelques bières dans la tronche et la musique à fond, tu politises moins le débat mais c’est quand même super bon d’être là, avec ses semblables, avec celles qui t’attirent, celles avec qui tu baises et celles qui te donnent envie. On dit que ça manque d’ouverture. Et je réponds que non parce que ça voudrait dire que c’est à moi en tant que femme d’aller vers les mecs, leur montrer de quoi je suis capable (alors qu'on ne se pose jamais la question inverse). Est ce que les mecs s’intéressent, produisent et militent pour les femmes ? Très peu je crois. L’omniprésence des hommes dans n’importe quel domaine est bien là pour le prouver. Et puis pour faire simple, et sans faux culterie, je veux des soirées non mixtes dans ma vie, pour draguer, pour mater parce que je suis gouine et que j’en ai vraiment de plus en plus ras le bol de vivre, de sortir dans une société complètement hiérarchisée (les hommes dominent, les femmes ruminent), complètement cadrée sur l’hétéro, sur le « quand je serai grande j’aurais des enfants, deux, un garçon et une fille » et puis marre aussi de ne plus me retrouver dans ces endroits gay complètement aseptisés, avec des tas de mecs avec qui je n’ai rien en commun, à écouter de la musique de merde, tout ça, sous prétexte que c’est « ma communauté ». C’est fini ce temps là, je ne m’y retrouve plus (sauf dans mon bar chéri du Marais, les souffleurs). D’ailleurs, est-ce que ces mêmes garçons homos comme ils disent (oh la référence encore super trop forte), font quelque chose pour nous, les gouines ? Rien. Je n’ai jamais rien vu, rien entendu, même rien perçu. Alors aujourd’hui je suis pour une non-mixité des soirées, peut-être pas toutes mes soirées mais le plus souvent possible et une non-mixité, non pas, contre les hommes… mais pour les femmes.